Tshisekedi semble avoir laissé tomber Kamerhe. Il y a quelques mois, personne ne pariait sur sa capacité à tenir tête à certains caciques du pouvoir. Pour le moins nul n’aurait imaginé qu’entre le “nouveau” et l’ “expérimenté” il se passerait ce qui trame à Kinshasa. Car effectivement, au-delà de ce qu’il faut qualifier pour le moment de soupçons de corruption, on assisterait à une sorte de règlement de comptes entre le Président de la République Démocratique du Congo et son Directeur de cabinet.
La brouille entre les deux proviendrait de désaccords personnels entre les deux; des mensonges et non-dits qui ont été perçus par Félix Tshisekedi comme un manque de loyauté. Pour le moment, on s’avance vers un emprisonnement de Vital Kamerhe.
Vital Kamerhe, jusqu’à lors Directeur de cabinet du Président Félix Tshisekedi est un habitué du pouvoir et de la gestion de la chose publique. Lui qui était déjà un homme clé du régime de l’Ex-président Kabila. Dans la soirée du 8 avril, ce qui n’était alors qu’une rumeur devient réel: Vital Kamerhe est arrêté et placé en détention à la prison centrale de Makala.
L’opposant est soupçonné de « détournements de fonds publics ». Plusieurs centaines de millions de dollars ont été décaissés dans le cadre de l’initiative des 100 premiers jours du Président Tshisekedi. Ces fonds étaient destinés à la finalisation des plusieurs chantiers parmi lesquels certains entamés par le précédent régime.
Ces chantiers sont placés sous la supervision de Vital Kamerhe. Convoqué en début du mois afin d’en savoir un peu plus sur la gestion de ces fonds, la Cour affirme aujourd’hui avoir assez d’éléments pour inculper Vital Kamerhe de détournement de deniers publics. Ceci est inédit dans ce pays qui se classe parmi les plus corrompus au monde.
TSHISEKEDI TRAQUE-T-IL VRAIMENT TOUS LES CORROMPUS
Il y a quelques jours, et sous proposition du PNUD, Me Akéré Muna, l’ancien bâtonnier de l’Ordre des avocats du Cameroun alors consultant sur les questions de corruption et de gouvernance a été sollicité par le président congolais pour appuyer ses efforts de lutte contre la corruption en RDC. La RDC a besoin d’investissements et l’un des freins est la corruption institutionnalisée et légitimée.
« La corruption est institutionnalisée à tous les niveaux, et il y a un vrai manque de contrôle avec des organismes comme la Cour des comptes qui sont complètement muselés », détaille Valéry Madianga, porte-parole de l’ODEP. En janvier 2020, le rapport de Transparency International sur l’indice de perception de corruption classait la RDC au rang de 168e sur 180 pays. Un score de 18 % traduisant une augmentation de la corruption en RDC par rapport à 2018. Ce qui place le pays au plus bas de l’échelle.
Mais la corruption est-elle la cause réelle de cette arrestation ? Plusieurs histoires similaires ont eu cours. C’est le cas pour l’Affaire des 200 millions de dollars de la GECAMINES qui devaient atterrir dans les comptes du Trésor publics et qui avaient mystérieusement disparus de même que la suite de l’instruction judiciaire; celle de la mauvaise gestion de la SNCC, avec l’ex-opposant devenu Premier Ministre. Il dirigeait à cette époque ladite société.
Le moins qu’on puisse dire, c’est que le Directeur de Cabinet n’a pas la possibilité de s’enfuir avec la crise de la pandémie du COVID-19 qui bloque les frontières. Il est donc incompréhensible que de tous ceux qui ont été interpellés, seul Vital Kamhere reste sous les verrous. Autre
paradoxe, c’est le fait que malgré cette détention, le Directeur de Cabinet demeure en poste. Tout n’est pas encore dit dans cette histoire.