AFRICAINS, DE QUOI VOUS SOUCIEZ-VOUS ?
Africains, de quoi vous souciez-vous vraiment? Quel bien commun vous est si cher que vous vous levez pour vous battre s’il est attaqué ?
Est-ce la religion ? Le Pape François vient d’effectuer une visite remarquée au Royaume du Maroc. La chaleureuse réception que lui a accordée le Roi Mohammed VI du Maroc n’était pas que de belles images. Elle témoigne d’une tolérance retrouvée en terre africaine, de deux courants spirituels différents, qui des siècles durant, se sont livré les plus longues guerres de l’histoire. Elle a démontré la capacité du Maroc à rester fidèle à son identité : centralité de l’Islam, possibilité d’exercice d’autres religions.
D’ailleurs, le Préambule de la Constitution du Royaume Chérifien est clair :
« Le Royaume du Maroc, État musulman souverain, dont la langue officielle est l’arabe, constitue une partie du Grand Maghreb Arabe. État africain, il s’assigne, en outre, comme l’un de ses objectifs la réalisation de l’unité africaine. Conscient de la nécessité d’inscrire son action dans le cadre des organismes internationaux, dont il est un membre actif et dynamique, le Royaume du Maroc souscrit aux principes, droits et obligations découlant des Chartes des dits organismes et réaffirme son attachement aux droits de l’Homme tels qu’ils sont universellement reconnus. De même, le Royaume du Maroc réaffirme sa détermination à œuvrer pour le maintien de la paix et de la sécurité dans le monde. »
Ce numéro de votre magazine vous offre un reportage exclusif sur le voyage du Pape au Maroc. En le lisant, vous ne manquerez aucun des temps forts de cet événement rare.
Est-ce de la santé que les Africains se soucient le plus ? Dans ce cas, tournons le regard vers les positifs développements en Guinée Équatoriale. Pensez qu’en 2003, dans l’Île de Bioko où se situe la capitale Malabo, une personne subissait en moyenne dix mille piqûres de moustique par an. La malaria tuait les hommes pour ainsi dire comme des mouches. Aujourd’hui, ce chiffre est tombé à trois. Que s’est-il passé ?
Un exemplaire modèle de partenariat public-privé a vaincu les moustiques et est en voie d’éradiquer la malaria dans l’Île de Bioko. À notre connaissance, c’est un résultat unique en Afrique. Le gouvernement équato-guinéen s’est allié avec Marathon Oil qui opère dans les hydrocarbures équato-guinéens. Les deux parties ont lancé un programme antipaludéen de longue durée. Il a porté ses fruits.
Tout le monde gagne: d’abord, la population qui se porte beaucoup mieux. Son taux de mortalité a chuté. Ensuite, le gouvernement : il bénéficie d’une population maintenant en bonne santé, confiante, qui n’a plus peur de la malaria laquelle autrefois endeuillait mensuellement les familles. Enfin, Marathon Oil, dont les travailleurs, désormais en bonne santé, sont plus productifs et dont l’absentéisme pour cause de malaria a presque disparu alors qu’avant le programme, il se chiffrait par centaines chaque semaine.
La réussite du programme antipaludéen équato-guinéen est un exemple de Responsabilité Sociale d’Entreprise. Pour nombre d’entreprises exploitant l’Afrique, la RSE est un gadget de marketing. Tel n’est pas le cas du programme antipaludéen de Marathon Oil. Cette entreprise texane a pris la RSE au sérieux. Elle a focalisé sur le service aux populations. Surtout, elle a établi dès le départ, des indicateurs pour mesurer le progrès vers les objectifs fixés.
Les Africains se soucient-ils des réparations ? J’en doute, et ils ont tort. Les descendants d’esclaves dans les Amériques et partout ailleurs dans le monde méritent réparations. Ce numéro de Hommes d’Afrique magazine commence une série qui manifestera notre soutien aux réparations.
Jusqu’ici, les gouvernements africains se sont lamentablement comportés sur la question des réparations. Aucun d’eux ne s’est proclamé pour celles-ci. Aucun d’eux n’a même approché ces descendants d’esclaves, pourtant nos frères et sœurs, pour comprendre leur combat. La société civile africaine, les médias, ne doivent pas commettre la même bêtise que nos gouvernements. Soutenons les réparations, exigeons qu’elles soient payées. Faisons-en une préoccupation majeure de la politique internationale africaine. Inutile d’attendre que l’Union Africaine bouge, elle ne nous sera d’aucune aide.
De quoi se soucient encore les Africains ? De la xénophobie? Parlons-en.
La xénophobie est un cancer de peau de la nation sud-africaine. Il est urgent que le reste du continent se mobilise pour soigner ce mal. Depuis des décennies en Afrique du Sud, des meutes de Noirs sud-africains attaquent et tuent, notamment en les brûlant vifs, des Noirs non sud-africains. Ce sont des massacres bien ciblés, qui épargnent les Blancs, les Indiens, les Pakistanais, les Arabes, bref tout le monde sauf les Noirs non sud-africains.
Cette tragédie a pris des proportions alarmantes le mois dernier. A la veille des élections du 8 mai 2019, des politiciens et des chefs traditionnels encouragent le meurtre. Tout comme la meute tueuse, ces politiciens et chefs traditionnels sont impunis. La police laisse faire. Seule une voix s’est élevée contre cette horreur : Julius Malema, à qui Hommes d’Afrique magazine rend ici hommage.
Mais pourquoi donc le reste de l’Afrique se tait ? Que fait l’Union Africaine ? Où est la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples ? Où sont nos dirigeants? De quoi se soucient-ils?